Alors que les biotechnologies arrivent à un tournant crucial de leur développement, le passage à l’échelle industrielle demeure une étape complexe à franchir pour bon nombre de projets.
Pour soutenir cette étape, Genopole mise sur deux infrastructures complémentaires : GATEX, plateforme de bioproduction jusqu’à l’échelle pré-industrielle, et Protopia, laboratoire de formulation et de tests de produits finis.
Leur articulation permet d’accompagner les projets de la preuve de concept à la formulation de l’ingrédient produit par fermentation de précision, en passant par la montée en échelle progressive afin de tester la robustesse de la souche.
Explications croisées avec leurs responsables, Christophe Lanneau, directeur Recherche & Plateformes, et Julien Picot, directeur adjoint délégué aux infrastructures et plateformes technologiques
Une chaîne de valeur cohérente, du laboratoire à l’usine
L’association de GATEX et Protopia répond à une problématique bien identifiée : 90 % des projets biotechs cherchant à produire des molécules d’intérêt pharmaceutique, cosmétique ou agroalimentaire par fermentation de précision échouent lors du passage à l’échelle industrielle.
Ces deux infrastructures, pensées comme un continuum, ont été conçues pour limiter les risques techniques et financiers liés à ce basculement critique.
« GATEX est une infrastructure dédiée à l’optimisation des souches, du process et des milieux de culture pour faciliter la montée en échelle progressive. Elle permet de tester la robustesse des souches à produire la molécule d’intérêt pharmaceutique, cosmétique ou agro-alimentaire jusqu’à l’échelle pilote et ainsi de dérisquer les projets biotech avant le cap industriel », explique Julien Picot.
Protopia, en aval, intervient comme un laboratoire de prototypage de formulation, orienté notamment vers les applications en agroalimentaire et en cosmétique. Il accompagne l’optimisation des procédés issus de GATEX pour garantir leur reproductibilité et leur adéquation au marché.
Une réponse concrète aux freins de l’industrialisation
L’industrialisation des biotechs ne relève pas seulement d’une question de volumes.
Elle suppose de surmonter plusieurs défis :
- l’optimisation des rendements et de la stabilité des procédés,
- la mise en conformité réglementaire,
- l’accès à des infrastructures adaptées sans investissements lourds et prématurés.
« Nos infrastructures permettent aux projets de se structurer sans avoir à construire immédiatement leurs propres outils industriels. GATEX permet aujourd’hui de monter jusqu’à 20 litres, et notre ambition est d’atteindre les quelques centaines litres d’ici trois ans », précise Christophe Lanneau.
La complémentarité joue aussi dans les marchés adressés : là où GATEX s’ouvre à tout type de projet de bioproduction, Protopia cible plus spécifiquement les secteurs à cycles de développement courts, comme l’agroalimentaire ou la cosmétique, avec des impératifs de formulation très concrets.
Si GATEX et Protopia ont été conçues en priorité pour répondre aux besoins des startups – souvent démunies en matière d’accès à des équipements de production ou de formulation –, elles s’adressent aussi à des structures plus établies.
PME, ETI ou centres de recherche peuvent y trouver un appui ponctuel ou stratégique pour tester de nouvelles voies de développement, valider des procédés ou lancer un démonstrateur. Cette ouverture reflète la volonté de Genopole de soutenir l’ensemble de l’écosystème d’innovation en biotechnologies, quels que soient le niveau de maturité ou la taille du porteur de projet.
En termes de surfaces et d’aménagements, Protopia propose dès aujourd’hui une première phase fonctionnelle avec cinq box locatifs, d’environ 10 m² chacun. Ces espaces permettent aux entreprises d’installer leurs activités dans un environnement sécurisé, tout en bénéficiant d’un accès immédiat aux ressources mutualisées du site : un plateau analytique permettant la formulation, un laboratoire de culture L2, un laboratoire de microbiologie et une zone de préparation d’aliments industriel incluant des ingrédients issus de fermentation de précision.
Concernant GATEX, une première configuration de laboratoire d’une surface de 70 m2 environ permet de travailler jusqu’à un volume de 20 litres, idéal pour les phases de pré-industrialisation.
Une seconde phase est déjà en cours d’instruction : d’ici 2027, un nouveau projet de 1 200 m² pourrait voir le jour avec une capacité d’accueil d’équipements permettant de produire suffisamment d’ingrédient pour être utilisé dans l’infrastructure Protopia.
Une vision stratégique pour structurer une filière française de bioproduction
GATEX et Protopia ne sont pas des outils isolés : ils s’inscrivent dans une ambition nationale.
Genopole est membre actif de la biofonderie de Paris, initiative portée par plusieurs acteurs publics et privés pour créer un écosystème de pointe autour de la biologie de synthèse.
« Nous avons voulu construire des infrastructures modulaires et accessibles à différents stades de maturité. L’idée, c’est d’offrir un parcours fluide, de la recherche à l’industrialisation, pour éviter que l’innovation scientifique ne reste bloquée au stade de la paillasse », résume Christophe Lanneau.
La biofonderie de Paris vise à accélérer la conception, l’optimisation et la fabrication de micro-organismes et de biomolécules à finalité industrielle. GATEX et Protopia y jouent un rôle structurant, en mettant à disposition des startups et laboratoires un environnement favorable au prototypage, à la validation et à la production.
« La biofonderie est un lieu stratégique où se croisent expertise scientifique, ambitions entrepreneuriales et avancées technologiques. GATEX est l’une des briques essentielles permettant de produire par fermentation de précision suffisamment de produit d’intérêt afin de le tester et de le formuler dans Protopia« , affirme Julien Picot.