Yeasty a mis au point un procédé technologique inédit qui permet de valoriser un coproduit de l’industrie brassicole pour les besoins de l’industrie alimentaire.
La société, récemment installée à Genopole, parvient à désamériser les levures de bière et à les transformer en un ingrédient riche en protéines, en fibres et en minéraux, utilisable dans de nombreux segments du marché de l’alimentation durable.
Juan Londono, directeur des opérations de Yeasty (en bas à gauche sur la photo), nous en dit plus en répondant à nos questions.
Pouvez-vous nous expliquer l’innovation de Yeasty ?
Juan Londono : « Nous valorisons la levure non utilisée des producteurs de bière pour rendre toute cette biomasse utilisable pour l’alimentation humaine. Nous avons mis au point un procédé technologique unique, notamment avec l’aide de Genopole et d’Agro Paris Tech, capable d’éliminer l’amertume des levures de bières, sans en altérer la naturalité, ce qui permet justement d’obtenir un ingrédient extrêmement riche et complet sur le plan nutritionnel. »
Comment l’idée est-elle née ?
Juan Londono : « Nikola Stefanovic et Mathieu Durand, co-fondateurs de Yeasty, ont commencé à s’intéresser au processus de fabrication de la bière quand ils étaient étudiants à Agro Paris Tech. Ils faisaient partie de l’association Brassicole de l’école et participaient à sa petite production artisanale. En s’intéressant au potentiel de revalorisation de différents co-produits, ils ont découvert que les levures de bière issues du brassage sont jetées : un immense gâchis quand on sait les qualités nutritionnelles incroyables des levures, qui contiennent 50% de protéines, des fibres, des vitamines, des minéraux ! C’est une ressource extrêmement intéressante pour l’industrie alimentaire qui répond en plus à un objectif de responsabilité et de durabilité. »
Les levures de bière ne sont pas du tout recyclées aujourd’hui ?
Juan Londono : « Une très faible partie est recyclée pour l’alimentation du bétail ou pour la production d’exhausteurs de goût et d’arômes dont les procédés existants, plus complexes et coûteux, éclatent la cellule pour en extraire les composants d’intérêt. Finalement, une très grande majorité de ces levures termine aujourd’hui en station d’épuration. »
Comment organisez-vous votre collaboration avec les brasseurs ?
Juan Londono : « On avait imaginé au départ coopérer avec des micro-brasseries mais on s’est rendu compte que cela impliquait beaucoup de transport, qu’on y perdait sur le plan économique et sur le plan environnemental, enjeu majeur pour Yeasty. On a donc décidé de travailler avec des brasseries partenaires de taille intermédiaire ou des brasseries industrielles et de se greffer au plus proche de leurs installations. Nous leur proposons une solution clé en main : nous prenons en charge la logistique pour récupérer l’intégralité des résidus en sortie de brassage… Nous venons donc réduire le coût et la charge de travail associée à la collecte et au traitement des levures qui finissent bien souvent en station d’épuration. C’est pour eux très avantageux. »
Avez-vous approché des industriels de l’alimentaire ?
Juan Londono : « Nous avons aujourd’hui plus de 30 prospects dans des segments assez variés dans l’industrie alimentaire: l’alimentation quotidienne, la nutrition sportive, la nutrition clinique et la petfood. Nous allons officialiser dans quelques mois le lancement de notre premier ingrédient que nous leur fournirons pour qu’ils puissent le tester dans leurs recettes. Cela nous permettra de valider l’intérêt commercial de notre farine avant d’enclencher une 2e levée de fonds, après celle de 1,4 M€ bouclée en décembre dernier. Ce nouveau financement nous permettra de construire notre pilote préindustriel fin 2024 dans l’objectif d’atteindre une production de 100 tonnes par an. »
A horizon plus lointain, que sera Yeatsy ?
Juan Londono : « Nous visons à l’horizon 2025-2026, une première usine en France avec une capacité de production de plus de 5000 tonnes par an. L’objectif suivant sera de répéter le modèle d’industrialisation à l’étranger, en Asie, en Amérique du Nord, en Afrique … la vision de Yeatsy, c’est de proposer des protéines alternatives au plus grand nombre.
A terme, notre ambition est de diversifier notre production, de proposer de nouveaux ingrédients pour d’autres marchés, la nutraceutique ou les cosmétiques par exemple. Nous sommes pour cela à la recherche de partenariats avec de grands groupes. L’avantage de notre innovation est qu’elle peut adresser une très large palette de marchés.
Nous sommes donc ouverts aux discussions, n’hésitez pas à nous contacter . »
Contact : juan.londono@yeastyfood.fr
Quels sont les liens de Yeasty avec Genopole ?
Juan Londono : « Nous venons de nous installer à Genopole que nous retrouvons après avoir bénéficié du programme Shaker en 2020-2021. La société a été créée à la suite de Shaker en décembre 2021. Nous sommes ravis de pouvoir conduire notre R&D ici, dans ce bel écosystème qui donne accès à des équipements technologiques de pointe et qui est animé d’une très belle dynamique de soutien à la croissance des sociétés de biotechnologies. »
Ecouter aussi le témoignage de Nikola Stefanovic sur son expérience dans Shaker :