Au sein du laboratoire Structure et Activités des Biomolécules Normales et Pathologiques (SABNP), unité mixte Inserm/UEVE 1204 labellisée Genopole, David Pastré et ses collaborateurs ont élaboré une nouvelle méthode grâce à laquelle les interactions entre protéines peuvent être observées et quantifiées en temps réel, directement au sein de cellules mammifères vivantes, et ce en utilisant une structure naturelle de la cellule, le réseau de microtubules. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Scientific Reports*.
Une détection directement dans la cellule en utilisant une structure naturelle, le réseau de microtubules
Les microtubules sont de longs cylindres de rayon nanométrique dont la morphologie caractéristique est facilement observable par microscopie à fluorescence. Ils constituent une sorte de squelette de la cellule et jouent un rôle essentiel lors des divisions cellulaires. Les chercheurs du SABNP ont utilisé le réseau de microtubules comme une plate-forme d’étude des interactions entre protéines dans des cellules vivantes.
Le principe est simple : une protéine servant d’ »appât » est liée aux microtubules par l’intermédiaire d’un « linker ». Lorsqu’une protéine « proie » interagit avec la protéine « appât », la présence de la protéine « proie » est détectée par fluorescence sur les microtubules.
Les auteurs ont validé le potentiel de cette nouvelle méthode sur des cas d’interactions connues entre des protéines se liant à l’ARN ou des protéines de la membrane cellulaire. Les interactions ont été clairement visualisées sur les microtubules de cellules génétiquement modifiées exprimant l’ »appât » et la « proie ». Des outils numériques appliqués aux observations par vidéomicroscopie des cellules vivantes permettent en plus de quantifier le niveau d’interaction.
Une découverte aux atouts majeurs
Cette nouvelle technologie s’applique aux cellules de mammifères, donc mieux
représentatives de l’organisme humain que des cellules de levures ou d’autres
organismes. Elle peut d’ailleurs utiliser des cellules issues de différents organes pour étudier des interactions spécifiques, ou des cellules cancéreuses par exemple. Elle représente une rupture par rapport à l’état de l’art, comme le FRET (Fluorescence Resonance Energy Transfer) ou les méthodes basées sur une complémentation entre molécules (BiFC, Split-GFP). En effet, le système de fixation de la protéine appât et la structure extrêmement régulière des microtubules assurent une visualisation et une détection sans ambiguïté de l’interaction. De plus, la méthode est simple et rapide à mettre en œuvre.
Des applications pour la recherche médicale
Les interactions entre protéines jouant un rôle clé dans le fonctionnement des organismes vivants, cette méthode promet de nombreuses applications, en particulier pour tester l’action ou découvrir de nouveaux médicaments et pour mieux connaître les dérèglements associés aux maladies. En effet, elle offre la possibilité de cribler dans des cellules humaines l’efficacité de candidats médicaments agissant sur les interactions entre protéines. Elle permet aussi d’explorer dans des cellules vivantes l’impact de mutations responsables de maladies, afin d’en comprendre le mécanisme, puis de rechercher des molécules thérapeutiques capables de corriger l’effet de ces mutations sur les interactions entre protéines.
« Des développements sont en cours au sein du laboratoire SABNP pour étendre le domaine d’application de cette méthode innovante » annonce David Pastré, directeur du laboratoire. « L’objectif est en particulier d’aboutir à une détection et une quantification automatisées de la dynamique des interactions entre protéines dans les cellules vivantes en utilisant des techniques numériques« , précise-t-il.